Le vif du sujet.




Diplômée des Beaux-Arts de Reims, je me consacre à la peinture, à l’illustration et plus récemment à la reconstruction numérique de photographies anciennes.
J’ai toujours été passionnée par l’art du portrait en peinture et en photographie. Quelle que soit l’époque dans laquelle il s’inscrit et quelle que soit la personne qu’il représente, ce qui frappe dans le portrait d’art c’est la proximité physique et temporelle à laquelle il nous invite. Il nous met en présence de son modèle.
Pour exemple, lorsque nous regardons “La Joconde”, nous ne regardons pas une femme qui a été Mona Lisa, nous regardons Mona Lisa. Elle est là, devant nous.
Un bon portrait nous donne à voir une personne qui est en vie. C’est aussi vrai, bien sûr, pour le portrait en photographie, mais celui-ci reste le fruit du talent et d’une volonté artistique que malheureusement ou heureusement, la plupart de nos photos n’ambitionnent pas. Elles ne dépassent pas l’état de photo-souvenir.
Or, que devient ce souvenir quand tout ce qui l’a construit a disparu ? La découverte de vieilles photographies chez un bouquiniste parisien m’a amenée à m’ interroger sur le statut qu’elles occupent désormais dans notre rapport à l’image.  Elles nous montrent des personnes prises à un instant T de leur vie, mais dans le même temps nous savons que c’est du passé.
Nous sommes d’avantage en présence de leur fantôme que de leur réalité.
Ainsi, nos ainés nous ont laissé quelque chose d’eux que nous considérons avec une certaine distance, voire parfois avec indifférence, alors que leur intention était de nous dire leur présence au monde. La profusion de ces témoignages fragiles nous apparait comme les vestiges d’un temps plus ou moins lointain, petits fragments de mémoire que nous interrogeons à peine.
En contemplant certaines d’entre elles, je me suis demandée comment faire tomber cette frontière temporelle. Avec un peu d’imagination et de culture artistique, j’ai abordé cette démarche en assumant une part de fiction et de subjectivité.
La mise en couleur n’est pas mon objectif premier, elle n’est qu’un moyen pour l’atteindre et est bien loin d’être suffisante pour mettre en lumière la présence qui habite ces photos.
Il me faut y ajouter l’idée que ces personnes posent désormais pour moi.
Plus l’image est altérée, endommagée, mal composée, plus elle motive mon désir de la reconstruire ou plutôt de reconstruire le désir qui la sous-tend. Elle devient alors le cadre d’une scène que je réinvente et je m’attaque à l’idée un peu folle de portraitiser des personnes, qui en se soumettant au jeu de la photo-souvenir, espéraient peut-être qu’on ne les perde pas de vue.

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